« Enseigner l’empathie à l’école est indispensable quand la violence trône en majesté » - Tribune d'Elsa Da Costa, La Croix
La terrible croissance des suicides de jeunes adolescents victimes de harcèlement scolaire a déclenché la mise en place d’un plan d’urgence présentée par l’éducation nationale. Merci. Parmi les mesures proposées : la dispense de cours d’empathie dès les classes primaires. Celle-ci aurait presque prêté à sourire si elle n’était pas une des réponses aux drames dont nous sommes collectivement endeuillés. Nous, la grande communauté éducative de notre société. Les questions vont sans doute fuser, allant d’un jugement péremptoire du type « est-ce le rôle de l’école de dispenser l’empathie ? » en passant par l’injonctif « ils n’ont que ça à faire ! » à l’ironique « ça s’apprend, l’empathie ? ». Bien sûr que l’empathie s’apprend. Et surtout se cultive, dès le plus jeune âge et tout au long de la vie. Elle crée un lien fondé sur la relation en disqualifiant le lien transactionnel propre à notre modèle économique qui imprègne nos modèles organisationnels. La vie en société est assaillie par des violences continues. Et quelle que soit leur intensité, leur régularité construit un référentiel de comportement encore plus dévastateur pour nos jeunesses au système nerveux immature en matière de discernement. La violence trône en majesté dans les médias à coups de faits divers, d’images permanentes. Elle s’invite aussi dans les invectives de l’Assemblée nationale, dans les débats de nos politiques, dans les jeux vidéo, dans les conversations, dans les entreprises, sur les terrains de sport. Physique ou psychologique, elle s’infiltre partout, construisant non pas une zone de confort mais d’habitude. Elle se banalise. Quant aux réseaux sociaux, ils créent une déréalité progressive pour les utilisateurs compulsifs que sont les enfants. À tel point qu’il devient difficile de distinguer non seulement le vrai du faux, mais aussi la réalité de la fiction. Jusqu’à ce qu’un drame vienne déchirer le rideau de la virtualité. Bien sûr que les cours d’empathie s’avèrent nécessaires comme action curative. Mais ils sont indispensables à tous les âges de la vie, au sein de toutes les catégories sociales comme action préventive. Un socle pour le vivre-ensemble. Non seulement elle aide à mieux comprendre l’autre, mais surtout elle engendre des impacts positifs à long terme sur les individus, donc la société. À titre d’exemple, une étude récente publiée par The American Economic Review démontrait qu’après trente ans d’observation, de jeunes garçons canadiens de quartiers défavorisés formés à l’empathie à l’âge de 7 et 9 ans ont eu 30 % de chances supplémentaires d’accéder aux études supérieures que ceux qui n’en ont pas bénéficié. Une autre étude américaine montrait que 76 % des employés se sentaient engagés dans leur entreprise quand leur dirigeant était empathique. Qu’en serait-il de notre société si nos dirigeants politiques suivaient régulièrement des cours d’empathie ?L’empathie se cultive
Utilisation compulsive des réseaux sociaux