Introduction
Gaele transforme la façon dont la France soutient les enfants atteints d'autisme sévère en créant des outils pour intégrer les approches comportementales parmi les parents, les soignants et les institutions. Son modèle éducatif innovant basé sur les technologies de l'information est très facile à utiliser afin de faire tomber les barrières au changement des parents et des professionnels et de permettre aux enfants autistes de réaliser de grands progrès pour atteindre leur plein potentiel. Ils ouvrent également la porte à une intégration sans précédent dans le système scolaire.
L'idée nouvelle
Malgré la tendance internationale à reconnaître l'autisme comme un handicap neurodéveloppemental, la France a historiquement considéré et traité l'autisme comme un trouble psychanalytique. A l'inverse de la voie thérapeutique traditionnelle dans ce pays - qui consiste à rechercher la cause psychanalytique de l'autisme, à considérer le plus souvent les mères comme responsables du handicap de leur enfant, et à traiter les effets incontrôlés de l'autisme par des médicaments - Gaële se concentre sur l'éducation et l'intégration sociale des jeunes. Grâce au développement unique d'un ensemble d'outils éducatifs en ligne, faciles à utiliser et clés en main, Gaële permet l'adoption à grande échelle de ces approches comportementales. Les applications développées par son organisation « LearnEnjoy » donnent aux parents et aux aidants professionnels épuisés et mal équipés le pouvoir d'aider les enfants autistes à acquérir les méta-compétences (apprendre à apprendre, à imiter ou à prêter attention) et les capacités générales dont ils ont besoin pour se socialiser et progresser (communiquer, lire et écrire). Sans nommer les approches comportementales pour éviter les débats stériles entre les différentes écoles de pensée, elle réussit à faire basculer le système de prise en charge de l'autisme vers un nouveau modèle.
L'autisme en France se caractérise par une double situation avec une sous-capacité récurrente du système à accueillir tous les enfants autistes dans les centres éducatifs et sociaux, et des milliers de parents laissés sans solution viable. Gaële a basé toute son approche pédagogique sur la technologie pour une diffusion massive et rapide de ses solutions auprès de la population autiste. Pour quelques centaines d'euros et une tablette, parents et professionnels peuvent accéder, sans formation préalable, à des milliers d'exercices pédagogiques adaptés couvrant les étapes du développement de l'enfant de 12 mois à 5 ans.
Gaële légitime ces méthodes en prouvant que les enfants qui en bénéficient progressent. Tout d'abord, elle fait appel à des universités de premier plan pour mener des recherches scientifiques et prouver l'efficacité de son travail. Ensuite, elle ouvre la voie à une transformation profonde des pratiques du système médical en travaillant étroitement avec les institutions publiques et en développant des partenariats clés avec les organisations professionnelles et les centres de soins sur le terrain. En apportant ses solutions et ses formations à tous les acteurs de l'écosystème de l'enfant autiste, elle permet également aux écoles ordinaires d'accueillir ces élèves, offrant ainsi une solution à grande échelle à la sous-capacité des institutions spécialisées.
Le problème
L'autisme se développe en France : alors que le trouble autistique touchait 1 enfant sur 2 000 il y a 40 ans, c'est aujourd'hui environ 1 enfant sur 100 qui est concerné. Environ 440 000 personnes en France, dont 90 000 jeunes, sont aujourd'hui atteintes de troubles autistiques en France. Les troubles autistiques sont détectés en moyenne à l'âge de 6 ans, alors que les premiers signes peuvent être détectés dès 12 mois et que le diagnostic peut être posé entre 2 et 3 ans. Ce dépistage médical tardif empêche un travail d'intervention précoce sur le cerveau encore très malléable des enfants, limitant leurs chances de suivre un développement plus proche de la normale. Ce diagnostic médical tardif (quand il existe) est dû au fait que la France peine à reconnaître l'autisme comme un trouble du développement neurologique. Pour des raisons historiques liées à la prédominance de la vision psychanalytique des troubles autistiques en psychiatrie, les prises en charge dans le secteur sanitaire et médico-social - où les enfants sont accueillis par défaut, comme l'hôpital de jour - sont principalement axées sur le « soin psychique ». Cependant, il existe une acceptation internationale prédominante et des preuves scientifiques croissantes que l'autisme n'est pas une « psychose infantile » - un terme qui n'existe qu'en France. Les experts s'accordent de plus en plus à dire que l'autisme est un trouble neurodéveloppemental qui ne doit pas être traité par des approches psychanalytiques, mais plutôt par des approches comportementales. De nombreux ministères de la santé, comme celui de l'Espagne ou de la Nouvelle-Zélande, déconseillent même fortement ces pratiques et les résultats empiriques s'avèrent très prometteurs*. Depuis 2010, la Haute Autorité de Santé reconnaît l'autisme comme un trouble du développement et non comme une psychose infantile. Bien que la HAS recommande des approches comportementales pour traiter l'autisme, les pratiques et les mentalités des professionnels de santé sont profondément ancrées dans une logique psychanalytique. Selon une étude nationale, 77% des parents d'enfants autistes affirment que leurs enfants n'ont pas accès à l'éducation.
Il y a un fort manque de places disponibles dans les centres de soins spécialisés et les hôpitaux psychiatriques ; 13 000 enfants n'ont pas la possibilité d'être pris en charge dans une institution. Bien que les autorités tentent de combler cette lacune, les moyens restent insuffisants. Alors que 8000 enfants atteints de troubles autistiques naissent chaque année, la HAS prévoit de créer seulement 850 « places » dans les centres spécialisés au cours des trois prochaines années pour accueillir les enfants. Les conséquences sont dramatiques : les parents doivent s'occuper eux-mêmes de leurs enfants, à la maison, sans le soutien professionnel nécessaire. Ils sont de plus en plus nombreux à décider de placer leurs enfants dans des instituts privés à but lucratif situés en Belgique, qui souvent ne répondent pas aux normes sanitaires françaises, sont très coûteux et privilégient une approche de soins centrée sur les médicaments plutôt que sur les méthodologies éducatives. En 2013, le Conseil de l'Europe a condamné la France pour la deuxième fois pour maltraitance d'enfants autistes.
Nées aux Etats-Unis dans les années 60, les approches comportementales de l'autisme restent très marginales en France. Le premier centre spécialisé basant sa prise en charge sur les méthodologies comportementales a ouvert en 2005. Aujourd'hui, sur les milliers de centres spécialisés dans la prise en charge médicale et éducative des enfants malades mentaux, soutenus financièrement par les pouvoirs publics, seuls 25 appliquent officiellement les méthodologies comportementales. Même ces 25 centres peinent à être correctement équipés d'outils adaptés. Les formateurs internationaux sont rares et l'obtention d'une certification internationale (pour l'ABA par exemple) est à la fois coûteuse et longue. Seules trois universités en France délivrent des certifications locales, qui ne sont pas reconnues à leur juste valeur. Pour les parents qui s'occupent de leurs enfants à la maison ou les intervenants dans les instituts spécialisés, l'application de ces approches comportementales est compliquée et nécessite à la fois de la formation et du temps pour imaginer, concevoir et produire une grande quantité de supports tels que des images, des dessins, etc.
L'approche comportementale manque encore de légitimité en France pour être reconnue et adoptée plus largement par les parents et les professionnels de santé. Les professionnels de la santé et du social ont généralement une mauvaise opinion des approches comportementales existantes (qu'ils disent proches du « dressage animalier ») alors qu'ils en ignorent souvent le contenu. De plus en plus de professionnels commencent à utiliser de petites parties de ces méthodes, parfois sans même savoir qu'ils les appliquent. L'utilisation de pictogrammes, au cœur des approches comportementales, est de plus en plus reconnue comme une bonne pratique par un grand nombre de professionnels qui ne savent pas que ces outils sont issus des approches comportementales. Il y a également un manque évident de transparence et de collaboration entre le personnel médical et les parents, ce qui nuit à la continuité nécessaire dans la prise en charge des enfants. Les parents ont du mal à établir des relations avec le personnel médical et à accéder à des informations complètes sur leur propre enfant. Le système éducatif reste fermé aux enfants atteints de troubles autistiques ; les enseignants, les inspecteurs et les responsables de l'éducation ne sont pas formés à l'intégration des enfants atteints de troubles mentaux dans les classes et ne disposent pas des ressources humaines nécessaires pour le faire. Seuls 20 % des enfants autistes ont accès au système scolaire traditionnel, malgré une loi votée en 2005 qui stipule que l'éducation est un droit pour tous les enfants, quel que soit leur handicap. En comparaison, 80 à 100 % des enfants ont accès au système scolaire traditionnel dans des pays comme le Royaume-Uni ou l'Italie.
La stratégie
Gaële est la première à proposer une plateforme de solutions complète et simple d'utilisation permettant aux parents et aux professionnels d'accéder à des outils inspirés de l'approche comportementale pour les enfants autistes, bouleversant ainsi entièrement le système de prise en charge de l'autisme. Gaële a mobilisé une équipe pluridisciplinaire d'experts (orthophoniste, illustrateur, psychologue, psychomotricien) pour transformer les livres/méthodes/exercices existants - inaccessibles à la plupart des parents et aidants - en une boîte à outils complète et utilisable par tout un chacun. La boîte à outils prend la forme d'applications qui ne nécessitent pratiquement aucune formation préalable. Gaële a découvert les approches comportementales à travers une méthodologie spécifique (ABA-VB), les outils de LearnEnjoy reposent donc sur une combinaison unique de méthodologies, d'approches et d'expertises existantes. Cet ensemble inédit d'applications résulte donc d'une approche très globale. La boîte à outils LearnEnjoy comprend trois applications destinées à développer un large éventail de compétences - notamment en matière de communication, de vie quotidienne et de rigueur scolaire - que les jeunes enfants autistes ont du mal à développer par rapport aux autres enfants. Ces compétences sont essentielles pour améliorer leur intégration sociale : apprendre à imiter, à écouter et à communiquer. Les applications LearnEnjoy facilitent le développement de ces compétences clés à un âge crucial du développement : entre 12 mois et 5 ans. Les applications permettent également une intervention précoce des parents et des soignants professionnels par rapport aux soins traditionnels. De plus en plus de parents qui utilisent les applications avec leurs enfants témoignent de l'impact positif qu'elles ont sur le développement d'aptitudes concrètes qui stagnent souvent pendant des années avec les traitements traditionnels.
La boîte à outils LearnEnjoy a été développée avec l'aide d'une équipe d'experts qui a modifié les exercices et les a adaptés spécifiquement aux enfants autistes, en augmentant leur attrait visuel, en renforçant la logique de récompense et en encourageant les interactions entre les enfants et les parents ou les personnes qui s'occupent d'eux.
Ces trois applications couvrent trois niveaux de difficulté, et deux modes de jeu permettent soit à l'enfant d'utiliser l'application de manière autonome, soit aux parents de jouer côte à côte avec leurs enfants. Toutes les applications ont été intentionnellement développées pour les tablettes, une interface qui est non seulement considérée comme attrayante, mais qui est également de plus en plus utilisée par les enfants et les adultes. En outre, il a été prouvé que les tablettes facilitent la concentration, la compréhension et l'apprentissage lorsqu'il s'agit d'enfants autistes*.
Ces applications pour tablettes sont accessibles à tous les parents à un coût abordable - quelques dizaines d'euros contre des centaines ou des milliers d'euros de frais mensuels pour le placement d'un enfant autiste dans une institution spécialisée. Les coûts pour les centres de soins professionnels sont également très faibles grâce à 1) des partenariats avec les fabricants et fournisseurs de tablettes qui équipent gratuitement les enfants, et 2) l'accès au système de financement national pour la formation professionnelle afin de soutenir et de suivre les soignants dans l'utilisation du programme éducatif.
À terme, cette nouvelle technologie offrira de nouvelles possibilités de suivi pour mesurer les progrès accomplis. Pour accroître l'utilisation des applications LearnEnjoy par les parents, Gaële organise des formations tout au long de l'année. En l'espace de 12 mois, 300 parents ont déjà participé à des ateliers. Gaële cherche maintenant à créer un espace physique pour systématiser les formations et les solutions de supervision à plus grande échelle. Ses liens étroits avec les principales associations de parents d'enfants handicapés et sa capacité à exploiter le pouvoir du bouche-à-oreille permettent également à Gaële de mieux faire connaître les résultats de LearnEnjoy. Au cours des 18 derniers mois, les applications pour tablettes ont été téléchargées plus de 12 000 fois et sont entrées dans les premiers rangs de la catégorie « Education » de l'App Store.
Gaële contribue activement aux discussions menées par le gouvernement sur le sujet de l'autisme en France. Au-delà de son activité de lobbying, Gaële développe aujourd'hui un réseau de partenaires majeurs travaillant concrètement dans le domaine du handicap mental, et a déjà signé des partenariats avec deux acteurs majeurs de l'espace éducatif et médico-social : l'INS HEA (un institut d'enseignement supérieur travaillant autour de l'inclusion académique, de l'éducation et de la formation des personnes handicapées) et la FEGAPEI (une fédération nationale de 4.000 centres de soins travaillant avec des personnes affectées par des troubles mentaux). A travers ces partenariats, ses objectifs sont de proposer des formations, d'évaluer l'impact de l'utilisation des techniques comportementales sur les enfants autistes, d'encourager les praticiens à changer leurs pratiques et d'impliquer les familles dans le processus. Ces partenaires représentent un potentiel de diffusion très important : des milliers d'institutions spécialisées, des dizaines de milliers de professionnels de la santé et des centaines de milliers de bénéficiaires potentiels atteints de troubles mentaux sont en contact direct avec ces organisations.
Les technologies de base utilisées par LearnEnjoy sont un bon moyen de doter les enseignants d'outils concrets que les nouvelles politiques publiques les obligent à introduire dans leurs classes. Elles permettent également de jeter des ponts entre la sphère professionnelle (éducation, santé, médico-social) et les familles, afin de rétablir un dialogue indispensable entre les parents et les soignants grâce à cette base de discussion inédite. Gaële travaille en étroite collaboration avec le ministère de l'éducation pour relier les résultats obtenus grâce à ses applications sur tablette aux indicateurs standard utilisés pour évaluer le niveau scolaire des enfants. Elle construit ainsi un ensemble solide d'arguments tangibles que les parents peuvent utiliser pour aider les écoles à mieux soutenir leurs enfants. Gaële permet ainsi aux enfants autistes d'accéder à une éducation de qualité dans toute la France.
La personne
Gaële a grandi en se déplaçant entre la France, Madagascar et le Cameroun. Très jeune, elle décide d'apprendre le judo et devient en quelques années championne nationale de judo du Cameroun. Après avoir obtenu de brillants résultats scolaires, Gaële a entamé une carrière très prometteuse, qui l'a amenée à travailler pendant huit ans dans une société de conseil multinationale, puis pendant six ans dans l'une des plus grandes sociétés de médias au monde. En 2005, Gaële a donné naissance à son deuxième fils dont la motricité de base s'est détériorée au fil des années. Gaële est convaincue que son enfant est autiste, mais le pédiatre leur assure le contraire et ne pose aucun diagnostic pendant 6 mois. À l'âge de 20 mois, un médecin a finalement diagnostiqué un autisme sévère chez son fils. Gaële et son mari subissent un double traumatisme : les troubles mentaux de leur fils et les insuffisances du système de soins français. Ils découvrent à la fois l'approche psychanalytique (qui fait porter toute la responsabilité sur la mère, sans tenir compte de l'enfant), et les conditions de l'hôpital psychiatrique pour enfants, que Gaële refuse pour son fils. Ayant appris l'existence d'approches comportementales (comme ABA(VB)) pour traiter les troubles autistiques, Gaële a décidé d'appliquer elle-même la méthode. Pendant son congé de maternité, Gaële a rejoint une association qui promeut ces approches comportementales et construit des instituts spécialisés qui les appliquent. Elle souhaitait que son enfant soit accepté dans un tel institut, mais il n'y en avait pas près de chez elle, et même dans les endroits éloignés, il était très difficile d'obtenir une place en raison d'une grave pénurie.
Elle a donc décidé de réunir un groupe de parents, dans sa ville et ses environs, qui ont rejoint une association jeune et dynamique, et ont créé ensemble un tout nouvel institut. Gaele a joué le rôle de coordinatrice de projet en mettant à profit son expérience professionnelle en gestion de projet. En quelques mois, Gaële et l'équipe ont réuni suffisamment de fonds et obtenu les accords juridiques nécessaires à l'ouverture. Le centre accueille aujourd'hui - à temps plein - 15 enfants autistes. Il est souvent cité comme un modèle à suivre pour les autres institutions françaises. En approfondissant ses connaissances sur les approches comportementales, Gaële s'est rendu compte que les parents manquaient de solutions pour les mettre en œuvre : les livres sont souvent compliqués, les outils doivent être créés à plusieurs reprises, etc. Après avoir rencontré un parent veuf qui n'avait pas le temps de s'occuper de son jeune enfant autiste, elle a acquis la conviction que la mise en œuvre des approches comportementales devait être rendue facilement accessible à tous. Sa solide expérience dans le développement de solutions informatiques l'a amenée à imaginer une solution sur tablette que tout parent ou professionnel pourrait utiliser sans formation spécifique.
En parallèle, Gaële cherche à connecter son fils autiste à l'écosystème scolaire traditionnel, et rencontre de grandes difficultés à lui trouver une place dans une classe. Après avoir essuyé plusieurs refus, elle a écrit un « blurb » sur son fils et a finalement convaincu une école de l'accepter sur la base des connaissances concrètes et pragmatiques qu'il avait développées. Gaële est également très impliquée dans l'organisation militante bien connue « Agir et Vivre l'Autisme », dont elle est vice-présidente, et noue en permanence des relations étroites avec des personnes influentes dans les secteurs de l'éducation et de la santé.