Hélène Viruega
Ashoka Fellow depuis 2016   |   France

Hélène Viruega

Equiphoria
Pour changer en profondeur la façon dont nous concevons les processus de soins pour les patients souffrant de troubles neurologiques, Hélène développe une approche non médicamenteuse intégrative et…
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IDEE
 

Afin d’améliorer durablement l’autonomie de patients souffrant de troubles neurologiques et neuropsychiatriques graves, Hélène a développé Equiphoria : une démarche thérapeutique non-médicamenteuse innovante centrée sur le potentiel de chaque patient, dont l’une des caractéristiques est le recours à l’usage du cheval. Son approche multidisciplinaire prend en compte la spécificité de chaque patient, mais également les aidants qui composent son environnement quotidien. De plus, Hélène démontre l’efficacité de sa démarche en conduisant de rigoureuses recherches scientifiques, et contribue ainsi à valoriser les approches non-médicamenteuses comme un élément complémentaire aux thérapies existantes. Enfin, Hélène travaille à l’accessibilité financière de son parcours au plus grand nombre en nouant des partenariats avec des institutions médico-sociales, des mutuelles, des groupes de protection sociale privés.
 
IMPACT

L’approche d’Hélène montre des résultats significatifs sur l’autonomie des patients. Ayant à cœur de répliquer son travail, Hélène développe un réseau de centres thérapeutiques en propre et par un mode de franchise sociale. Une vingtaine d’établissements médico-sociaux ont déjà signé un contrat annuel, et plusieurs institutionnels remboursent les soins Equiphoria.
 
QUI EST-ELLE ?
 
Hélène a créé plusieurs sociétés en particulier dans le domaine équestre (une passion qu’elle vit depuis son plus jeune âge). Elle et son mari ont vécu et travaillé en Afrique, en Europe et en Amérique du Nord. Une rencontre marquante avec un pasteur thérapeute aux Etats-Unis fut le point de départ de sa quête pour l’amélioration de la prise en charge des personnes en situation de handicap.

This description of Hélène Viruega's work was prepared when Hélène Viruega was elected to the Ashoka Fellowship in 2016.

Introduction

Pour changer en profondeur la façon dont nous concevons les processus de soins pour les patients souffrant de troubles neurologiques, Hélène développe une approche non médicamenteuse intégrative et hautement personnalisable qui implique directement les soignants les plus proches du patient. Elle améliore la qualité de vie des patients et de leur entourage en s'appuyant sur la recherche scientifique et en faisant évoluer les mentalités dans l'écosystème de la santé sur la prise en charge des patients et les approches non médicamenteuses.

L'idée nouvelle

Pour améliorer durablement la qualité de vie des patients souffrant de troubles neurologiques développementaux, dégénératifs ou post-traumatiques, Hélène a conçu une nouvelle approche qui valorise le potentiel de chaque patient. Ce faisant, elle rompt avec une approche populaire des soins centrée sur la pathologie qui conduit souvent à catégoriser tous les patients gravement handicapés comme des cas désespérés. En utilisant le modèle de la thérapie équine, son processus de soins efficace prend en compte l'environnement quotidien du patient et fournit le chaînon manquant permettant aux aidants les plus proches (y compris les professionnels de la santé et les membres de la famille) de changer leur vision de ce que le patient est capable de réaliser, tout en augmentant simultanément l'autonomie du patient. Pour y parvenir, son protocole implique directement les aidants dans les séances thérapeutiques, soit par une participation active, soit dans une position d'observation et d'apprentissage.

S'appuyant sur les avancées des sciences du cerveau et d'autres spécialités connexes, Hélène apporte un éclairage professionnel et médical sur l'impact des thérapies holistiques non médicamenteuses. Au sein de son centre médical spécialisé de haute qualité, elle s'appuie sur la recherche scientifique pour prouver que leur utilisation est réellement efficace pour permettre à un patient handicapé d'atteindre son plein potentiel. Hélène commence par établir que le renforcement du lien entre l'homme et le cheval permet une récupération neuroscientifique durable ; sur cette base, elle crée des opportunités thérapeutiques pour traiter les patients souffrant de troubles neurologiques afin de maintenir et de renforcer le bien-être des patients.

Hélène engage tout un réseau de sympathisants à travers son approche afin de changer la façon dont ces patients sont considérés à très grande échelle. Pour ce faire, elle active trois puissants leviers : premièrement, elle s'efforce de faire évoluer les mentalités des professionnels de la santé, qui prescrivent les traitements, pour qu'ils considèrent les approches non médicamenteuses comme complémentaires aux thérapies existantes ; deuxièmement, elle garantit l'accessibilité financière de ce processus de soins en établissant des partenariats avec des institutions médico-sociales publiques et des groupes d'assurance mutuelle privés, avec un plan à plus long terme visant à fournir le programme par l'intermédiaire du système national d'assurance médicale ; enfin, elle soutient les entrepreneurs et les organisations locales pour reproduire le travail effectué par son centre en France et en Europe en identifiant les composants essentiels à utiliser. Son prochain centre médical est sur le point d'ouvrir au cœur d'un parc de recherche universitaire dédié à la médecine.

Le problème

La France a une culture traditionnelle et bien ancrée centrée sur la pathologie dans l'enseignement et la pratique de la médecine, dans laquelle le traitement de la pathologie identifiée a la priorité sur le potentiel de guérison du patient. En conséquence, les réponses non médicamenteuses restent limitées et sont le plus souvent inconnues ou non prises en compte par les professionnels de santé lorsqu'il s'agit de concevoir un traitement médical pour un patient souffrant d'un handicap mental. La plupart des patients atteints de troubles neurologiques graves sont hébergés dans des établissements médico-sociaux qui peuvent difficilement se permettre d'offrir un processus de soins personnalisés pour travailler à l'amélioration de l'autonomie et de l'inclusion sociale. En 2011, en France, plus de 10 000 patients qui auraient pu accéder à un niveau d'autonomie accru en bénéficiant d'une solution alternative de prise en charge adaptée ont été hospitalisés dans des services psychiatriques.

De plus, la qualité de l'environnement du patient est rarement prise en compte. En conséquence, les proches aidants et la famille d'un patient handicapé mental ont très peu d'occasions d'apprendre à mieux gérer les situations émotionnellement lourdes auxquelles ils sont confrontés chaque jour. L'expression parfois très brutale des troubles mentaux du patient les met sous une pression constante ; souvent dépassés par l'état du patient, ils risquent l'épuisement professionnel. La fréquence élevée de l'absentéisme au travail chez les soignants de la société française est une indication alarmante de l'épuisement collectif auquel est confrontée la profession. Cette pression les empêche souvent de voir tout le potentiel individuel de leurs patients et peut leur donner l'impression qu'ils n'ont pas d'autre choix que d'adopter des pratiques limitatives avec le patient, malgré l'impact sur la qualité de vie et les capacités de ce dernier.

Cependant, il existe plusieurs possibilités de changement sans précédent. La recherche médicale se concentre de plus en plus sur les réponses alternatives aux traitements tout médicament ; plus spécifiquement, en neurosciences, les limites des thérapies tout médicament et une compréhension plus profonde du cerveau ouvrent une fenêtre pour les thérapies non médicamenteuses. En outre, les interventions non médicamenteuses ont été reconnues comme un secteur d'innovation majeur par l'État français dans le cadre de la stratégie européenne de spécialisation intelligente, ce qui implique que les fonds de l'UE pour le développement régional seront dirigés en priorité vers ce secteur, parmi 6 autres. Enfin, les autorités régionales de santé publique ont commencé à recommander la prescription d'interventions non médicamenteuses dans des contextes thérapeutiques spécifiques. Le défi consiste maintenant à changer la mentalité de chaque professionnel de la santé en ce qui concerne les approches non médicamenteuses, tout en étant capable d'offrir des interventions non médicamenteuses accessibles et de qualité.

La stratégie

Afin d'apporter une réponse efficace aux patients souffrant de troubles mentaux divers, Hélène a conçu un processus de soins holistiques non médicamenteux qui complète plutôt qu'il ne remplace le traitement actuel du patient. Par l'intermédiaire de son organisation, Equiphoria, Hélène s'efforce de changer les perceptions globales sur la manière dont les soins aux patients handicapés devraient être gérés, en utilisant l'exemple de la thérapie équine.

S'appuyant sur une approche médicale et sur la recherche scientifique, Hélène a normalisé des protocoles de diagnostic et de traitement de haute qualité en s'appuyant sur le lien entre l'homme et le cheval. Par exemple, les chevaux doivent être sélectionnés et entraînés de manière très spécifique. De plus, Hélène sélectionne les cas les plus extrêmes, pour lesquels les soignants ont dû adopter des pratiques contraignantes (par exemple, l'utilisation d'un système de contention pour assurer la sécurité du patient), mène des études cliniques rigoureuses et s'associe à des institutions académiques pour suivre précisément l'impact de sa thérapie. Pour ce faire, Hélène a développé avec un ingénieur un simulateur équin unique permettant de mesurer la plasticité du patient et d'enregistrer les améliorations après la séance d'équitation.
Pour accroître durablement l'autonomie du patient, le processus de soins d'Hélène prend en compte les personnes étroitement liées à l'environnement personnel et médical du patient. Pour ce faire, Hélène implique systématiquement les soignants les plus proches (les plus fréquents et les plus constants) ou les membres de la famille dans les séances thérapeutiques, leur donnant ainsi l'occasion unique d'observer et d'apprendre à connaître le potentiel du patient. Une formation d'une journée permet aux aidants professionnels de participer activement aux séances. Il en résulte une nouvelle configuration qui permet la progression du patient et un changement d'état d'esprit au sein de son environnement le plus proche. En influençant l'état d'esprit des soignants, Hélène provoque un effet d'entraînement qui atteint le réseau médical élargi, y compris les institutions socio-médicales. Pour suivre cet impact sur l'environnement quotidien du patient, Hélène a conçu une étude à mener de manière indépendante auprès des institutions socio-médicales.
Pour toucher le plus grand nombre de familles et de professionnels de la santé, Hélène construit un réseau de centres thérapeutiques à travers un modèle de licence ; ce modèle est particulièrement cohérent car il permet de garantir des standards de qualité, absolument nécessaires dans le monde médical, tout en permettant la spécialisation de chaque centre dans le traitement de pathologies spécifiques. Pour ce faire, Hélène a rigoureusement identifié et conçu les formations, les spécifications détaillées des exigences et les procédures qui doivent être strictement suivies pour développer et gérer un centre labellisé Equiphoria. Elle est actuellement en train d'identifier les partenaires médicaux locaux adéquats, parmi lesquels des Ashoka Fellows, pour étendre le réseau de centres.

Pour induire un changement d'état d'esprit plus large à l'égard des soins aux patients et faire en sorte que son approche se généralise, Hélène fait appel à un large éventail d'acteurs clés. Elle ouvre les professionnels de la santé (prescripteurs) à sa vision en activant deux leviers : d'une part, elle s'appuie sur ses résultats scientifiques pour communiquer au sein de la communauté médicale ; d'autre part, elle contribue à changer la façon dont les futurs professionnels de la santé sont formés : à Montpellier, elle infiltre stratégiquement les cercles académiques en implantant un centre Equiphoria au cœur d'un parc de recherche universitaire dédié à la médecine. Mais Hélène n'engage pas seulement les professionnels de santé dans sa démarche, mais aussi les agences de santé publique et les assurances privées qui assurent l'accessibilité financière de son processus de soins. L'autorité régionale de santé a déjà autorisé les institutions socio-médicales à utiliser une partie de leurs fonds publics pour offrir les séances thérapeutiques d'Equiphoria à leurs patients. Aujourd'hui, plus de 20 institutions socio-médicales publiques sont partenaires d'Equiphoria, et Hélène a déjà convaincu une grande compagnie d'assurance privée française de rembourser 100% du processus de soins d'Equiphoria à ses clients.

La méthodologie d'Hélène étant basée sur la stimulation de la motivation intrinsèque de chaque patient, le rendant acteur de son propre traitement, il est possible d'ouvrir le champ des pathologies que ce processus de soins peut traiter. Pour l'avenir, Hélène adapte son modèle pour concevoir un programme pilote de soins et de bien-être pour les femmes atteintes d'un cancer du sein. Elle imagine également des adaptations financièrement plus légères de son modèle pour les pays en développement et a déjà identifié la diaspora africaine en France comme un levier unique pour étendre sa vision à l'échelle internationale.

La personne

Hélène a grandi en Afrique du Nord et de l'Ouest, où des raisons personnelles l'ont amenée à interrompre ses études de médecine pour se lancer très tôt dans la vie professionnelle. Véritable serial entrepreneuse, Hélène a créé plusieurs entreprises, de l'ouverture d'une agence de mannequins à la mise en place d'une activité de coaching personnel pour les populations à risque.

Alors qu'elle travaillait aux États-Unis à la création d'un centre équestre international, Hélène a fait une rencontre déterminante avec un pasteur-thérapeute local qui s'occupait de personnes gravement handicapées en leur proposant des séances d'équitation. Fortement impressionnée par les résultats spectaculaires qu'il pouvait avoir sur la qualité de vie des personnes handicapées, Hélène a décidé d'en savoir plus sur ce type de pratiques et s'est formée. Elle découvre alors les limites des solutions existantes : l'équithérapie, malgré son énorme potentiel d'impact sur la santé et la qualité de vie, reste confinée dans le « monde du cheval », donc loin d'être reconnue par la communauté médicale et remboursée par les systèmes d'assurance-maladie. En France, Hélène a en effet pris le temps de faire une recherche personnelle sur le terrain qui a confirmé que ce type de thérapie manquait cruellement de normes médicales sérieuses.

Mais Hélène a vu dans la thérapie par le cheval l'opportunité de révolutionner la prise en charge des patients handicapés ; elle a donc décidé d'utiliser son expertise pour créer son propre processus thérapeutique, axé sur la médecine. La France, avec son approche profondément ancrée dans la pathologie et centrée sur la prise en charge des patients handicapés, semblait être l'endroit idéal pour commencer le travail. Elle a réussi à rassembler plusieurs associations d'institutions médico-sociales pour qu'elles deviennent des partenaires financiers du projet Equiphoria et s'est installée en Lozère, en France. De plus, elle a convaincu son mari de devenir son associé et d'utiliser ses compétences en finance pour s'occuper des dimensions administratives et financières d'Equiphoria. L'installation de ce premier centre de thérapie n'a pas été facile : juste après l'ouverture, la petite équipe a dû faire face à un hiver particulièrement froid qui a gravement endommagé les installations qu'ils venaient de construire. Mais Hélène a fait preuve d'une très grande détermination à réussir, une force mentale qu'elle continue d'exprimer chaque jour pour faire entendre sa voix sur la prise en charge des patients.